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Série

A Lorient, les bunkers se muent en pôle nautique

Témoins de la puissance allemande de la Seconde Guerre mondiale, des bunkers indestructibles bordent la rade de la ville. Les courses au large s'y préparent.

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Par Stanislas du Guerny

Publié le 17 juil. 2013 à 01:01Mis à jour le 6 août 2019 à 00:00

Impossible de manquer la vue sur les impressionnants bunkers bordant la rade de Lorient, qui s'ouvre sur l'Atlantique. Ils sont trois, nommés K1, K2, K3 pour Keroman, du nom de la presqu'île sur laquelle ils ont été construits par les forces allemandes pendant la Seconde Guerre mondiale. Hauts de 20 mètres et long de plus de 130 mètres pour le bâtiment le plus important, il s'agit de véritables « bunkers cathédrales ». La municipalité a bien envisagé de les démolir tant ils barrent le paysage maritime, mais plus de 30 millions d'euros auraient été nécessaires pour réduire en poussière ces vastes ensembles gris bien peu attrayants, dont les plafonds de béton ont jusqu'à 10 mètres d'épaisseur. Le maire de la ville, Norbert Métairie, a donc poursuivi le travail initié par son prédécesseur, Jean-Yves Le Drian, l'actuel ministre de la Défense. Il a totalement reconverti la base après son abandon par la Marine nationale en 1995. Le second conflit mondial terminé, elle a en effet récupéré les trois bunkers des forces allemandes pour y abriter, construire et entretenir une partie des sous-marins de l'Hexagone. Le site lui a également servi pour l'expérimentation dédiée au lancement de missiles à tête nucléaire !

Une résistance à toute épreuve

Ce patrimoine industriel d'une résistance à toute épreuve a été construit en un temps record, de 1941 à 1944, par plus de 15.000 ouvriers venus de partout en Europe pour prêter main-forte aux troupes allemandes. « Elles avaient très bien fait les choses en concevant des bâtiments hautement sécurisés où elles pouvaient en toute discrétion souder, réparer, stocker leurs sous-marins d'attaque U-boote de la Kriegsmarine, puis les envoyer en mission lointaine sans que cela ne se voie », explique Luc Brauer, l'auteur de l'ouvrage « La Base de sous-marins de Lorient » (Liv'Editions). Il signale que 34 sous-marins pouvaient être simultanément entretenus à Lorient. Ce port devint ainsi la plus grande base navale de l'Allemagne sur la côte Atlantique. Même si cette construction du chantier naval a réclamé de nombreux ouvriers lorientais « bien payés par les Allemands », dit-on, cet ensemble stratégique n'avait pas de quoi réjouir la population locale, devenue involontairement la cible des alliés. Les bombardements anglais et américains vont se multiplier pendant toute la durée du conflit - des centaines d'alertes à la bombe -, la ville sera entièrement détruite, mais les bunkers ne bougeront pas !

Camp de base des courses au large

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Le calme est désormais revenu sur la base de Keroman, qui était quasi inaccessible aux civils jusqu'au départ des militaires français en 1997. Au plus fort de l'activité, 1.800 civils et gradés y travaillaient. Le site n'a plus une vie aussi intense, mais près de 500 personnes y sont encore présentes au quotidien. Car Norbert Métairie a transformé les 25 hectares de cet espace exceptionnel pour y installer notamment les équipes de préparation à la course au large. « Groupama » et son skipper Franck Cammas, par exemple, ont fait de Lorient leur principal camp de base. Et l'été dernier, la célèbre course à la voile Volvo Ocean Race y a fait une étape de plusieurs jours. Elle reviendra en juin 2015 pour la dernière étape de cette course mythique. Un centre d'affaires a aussi été créé, sous le nom de Celtic Submarine. Les entreprises installées appartiennent toutes au monde de la mer, comme la société Nass & Wind, spécialisée dans l'éolien offshore.

Cette transformation a un coût. Dans l'entourage de Norbert Métairie, on l'évalue à « près de 45 millions d'euros » grâce à des fonds obtenus en partie de l'Etat pour dédommager la ville du départ des militaires. Ils ont notamment servi à la construction, près des bunkers, de la Cité de la voile Eric Tabarly. Ce beau bâtiment de 2.000 m2, réalisé par l'architecte Jacques Ferrier, rassemble une partie des oeuvres du célèbre marin, ainsi que des expositions temporaires sur la mer et la navigation. Celle en cours concerne les expéditions de « Tara », la goélette scientifique amarrée à Lorient, qui effectue régulièrement des études scientifiques dans les mers lointaines. Quant aux voiliers « Pen Duick » qui appartenaient à Eric Tabarly, ils sont très souvent amarrés aux pontons bordant la Cité de la voile. Toujours devant les bunkers, le sous-marin « Le Flore », vestige des forces françaises, est ouvert à la visite pour une découverte de l'aventure militaire lorientaise. Les bâtiments K1, K2 et K3, eux, sont utilisés par les entreprises locales de la filière maritime pour le stockage du matériel, et l'agglomération a désormais prévu d'y aménager un port à sec pour les bateaux de plaisance en attendant d'autres projets. Plusieurs des alvéoles des bunkers sont encore vides.

Correspondant à Rennes Stanislas du Guerny

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